En 2025, l’Assurance Maladie a décidé de suspendre le déploiement de son logiciel Arpège, initialement conçu pour moderniser et automatiser le traitement des indemnités journalières liées aux arrêts de travail. Ce choix fait suite à de nombreuses difficultés techniques et organisationnelles observées lors des phases tests menées en Loire-Atlantique et en Vendée. Cette suspension entraîne des répercussions notables pour des milliers d’assurés, qui rencontrent des retards significatifs, voire l’absence totale, de versement de leurs indemnités. Ce dysfonctionnement met en lumière les enjeux majeurs liés à l’intégration de nouvelles technologies dans le secteur de la Sécurité Sociale, tout en dévoilant les complexités administratives auxquelles fait face la CNAM et les CPAM dans l’amélioration du parcours des assurés. Ces incidents soulèvent également des interrogations quant à l’organisation interne et à la coordination avec les acteurs tels que les médecins traitants, l’URSSAF et les gestionnaires de Mutuelle santé, indispensables au bon fonctionnement du système.
Arpège : un logiciel stratégique à l’épreuve des tests en Loire-Atlantique et Vendée
Le système Arpège a été conçu pour remplacer un logiciel jugé obsolète, avec pour objectif principal d’automatiser les traitements complexes liés aux arrêts maladie, accidents du travail ou maladies professionnelles. Cette automatisation devait garantir des délais de versement plus rapides et sécurisés des indemnités journalières, facilitant ainsi la vie des assurés et allégeant la charge administrative des CPAM. Toutefois, les premiers déploiements dans les départements pilotes révèlent un écart important entre les attentes et la réalité opérationnelle.
Concrètement, les tests ont mis en exergue deux types de difficultés majeures :
- Des délais de versement allongés : en Loire-Atlantique, les indemnités liées aux arrêts de travail mettent en moyenne 42,1 jours pour être versées, tandis qu’en Vendée, ce délai s’établit à 33,6 jours. Ces chiffres dépassent largement la moyenne nationale, qui s’établit à 30,8 jours selon la CNAM.
- Des erreurs dans le traitement des dossiers : plusieurs assurés se trouvent privés de leurs indemnités pendant plusieurs semaines, provoquant une vague importante de réclamations. La CGT de Loire-Atlantique évoque ainsi près de 15 000 dossiers en attente de résolution.
Cette situation a contraint la CNAM à mettre en place des palliatifs immédiats afin d’atténuer les conséquences pour les assurés :
- Mise en place d’acomptes pour les assurés concernés, évitant des ruptures de revenus prolongées.
- Renforcement de la plateforme téléphonique, destinée à améliorer l’accueil et le traitement des demandes.
- Augmentation des effectifs dans les équipes des CPAM de Loire-Atlantique et Vendée, pour accélérer la gestion manuelle des dossiers en difficulté.
- Lancement d’un audit approfondi pour identifier précisément les causes des dysfonctionnements et élaborer des pistes d’amélioration.
Malgré ces mesures, l’optimisation reste problématique et a conduit à la suspension du logiciel Arpège. Ce revirement fait également écho à un report déjà observé en début d’année pour le déploiement national du système, prévu initialement en 2026. Cette décision souligne d’importantes questions quant à la préparation et à la concertation entourant l’introduction de solutions numériques dans le secteur public.

L’interaction entre Arpège, la CPAM et les autres acteurs de santé
Le succès d’un outil comme Arpège dépend étroitement de son intégration optimale avec les acteurs essentiels du système de santé et de protection sociale. Ces acteurs comprennent notamment :
- Le médecin traitant, qui émet les certificats d’arrêt de travail, dont la transmission rapide et fiable au logiciel est cruciale.
- Les gestionnaires de la CPAM, chargés de valider, contrôler et procéder au paiement des indemnités.
- L’interaction avec les organismes comme l’URSSAF et l’Agirc-Arrco pour la prise en compte des cotisations et droits sociaux.
- Les mutuelles santé, qui interviennent parfois en complément des indemnisations officielles.
Une des failles constatées lors des tests serait précisément liée à ces interactions complexes. Par exemple, un décalage dans la remontée des informations ou un traitement incorrect des données issues du logiciel SNGC, utilisé pour le traitement des données clients, peut retarder la procédure entière. En conséquence, les assurés se retrouvent dans des situations où l’absence temporaire d’indemnités met en tension leur équilibre financier et social.
Cette problématique prouve que si la technique est au cœur des améliorations souhaitées, la coordination humaine, la formation des agents et une approche systémique sont essentielles pour la réussite d’un tel projet.
Conséquences sur les assurés : entre retards, tensions et recours
Les défaillances d’Arpège ont un impact tangible sur la vie quotidienne et la sécurité économique des assurés. En premier lieu, le paiement retardé ou absent des indemnités journalières met en danger la capacité des personnes en arrêt maladie à subvenir à leurs besoins élémentaires.
Plusieurs cas ont été remontés montrant des assurés confrontés à des délais de versement dépassant plusieurs semaines, créant un effet domino :
- Accroissement des tensions avec les bailleurs et fournisseurs, en raison des retards dans le paiement des loyers ou factures.
- Inquiétude accrue sur la pérennité de la couverture sociale et sur la gestion des imprévus financiers.
- Multiplication des contacts avec la CPAM et recours fréquents au support téléphonique, engorgeant davantage les services.
Cette situation paradoxale, où un outil censé faciliter les démarches complique en réalité l’accès aux droits, provoque aussi un désarroi chez les professionnels de santé et les responsables de la Sécurité Sociale. Ces derniers doivent parfois jouer un rôle de médiation entre les assurés et les services administratifs.
Tableau récapitulatif des impacts observés :
Conséquences pour les assurés | Exemples concrets | Solutions apportées |
---|---|---|
Retards de versement des indemnités | Attente de 42 jours en Loire-Atlantique | Versements d’acomptes temporaires |
Augmentation des réclamations | 15 000 dossiers en attente de traitement | Renfort des équipes de la CPAM |
Tensions financières | Difficultés à régler les charges courantes | Ajustement de la communication et aide socialisée |
Recours possibles pour les assurés confrontés aux difficultés
Face à ces complications, les assurés disposent de plusieurs voies pour tenter de faire valoir leurs droits :
- Contacter leur CPAM directement via le site Ameli ou la plateforme téléphonique renforcée.
- Se rapprocher de leur médecin traitant afin d’obtenir un suivi et assistance dans leur prise en charge.
- Solliciter des conseils auprès des associations de défense des droits des assurés ou des syndicats comme la CGT, très actifs sur ces questions.
- En dernier recours, engager une procédure contentieuse pour retard de versement ou absence d’indemnisation.
Les enjeux et enseignements pour la CNAM et le futur des automatisations
La suspension du logiciel Arpège invite à relire la stratégie de digitalisation de la CNAM dans le traitement des arrêts de travail. Dans un contexte où la dématérialisation est jugée prioritaire pour la modernisation de la Sécurité Sociale, cette expérience met en lumière plusieurs enseignements.
Parmi les enjeux majeurs identifiés, on note :
- La nécessité d’une phase de test rigoureuse et étendue avant tout déploiement national, afin d’identifier tous les dysfonctionnements potentiels.
- L’importance d’une coordination forte avec l’ensemble des acteurs : médecins, gestionnaires des CPAM, URSSAF, mutuelles et organismes complémentaires doivent être pleinement intégrés au projet.
- La question des formations adaptées pour préparer les agents aux outils innovants, ce qui limite les erreurs de manipulation et augmente la qualité du service rendu.
- La mise en place de dispositifs de secours efficace pour ne pas pénaliser les assurés lors des phases délicates de transition.
Le développement futur d’un nouvel outil automatisé devra aussi tenir compte des usages terrain, des contraintes réglementaires et du besoin d’équilibre entre automatisation et intervention humaine. Ce dernier point est souvent souligné par les professionnels de santé et gestionnaires, qui alertent sur le danger d’un système trop rigide incapable de prendre en compte les spécificités individuelles des dossiers d’arrêt de travail.
Enfin, la CNAM prévoit, à l’issue de son audit en cours, d’élaborer une feuille de route pour un outil plus performant et mieux adapté, qui devrait s’appuyer sur les conclusions tirées de l’expérience Arpège. La co-construction avec les utilisateurs finaux — agents des CPAM, médecins traitants, assurés — s’annonce comme une priorité pour garantir la fiabilité et l’acceptation du futur système.
Les impacts de la suspension du logiciel sur les partenaires sociaux et les assurances
L’arret du déploiement d’Arpège ne concerne pas uniquement les assurés et la CNAM. Il engage également un ensemble d’acteurs partenaires du système de protection sociale, notamment les mutuelles santé, l’Agirc-Arrco, et les organismes collecteurs comme l’URSSAF. Ces partenaires dépendent directement de la bonne circulation des données relatives aux arrêts de travail et aux indemnités.
Les mutuelles santé, par exemple, interviennent souvent en complément des prestations versées par la Sécurité Sociale. Leur coordination avec la CPAM repose sur des échanges fluides via des systèmes informatiques intégrés. Le dysfonctionnement d’Arpège a donc provoqué :
- Des blocages dans la mise à jour des dossiers des assurés.
- Des retards dans le versement des complémentaires santé, affectant la gestion financière des assurés.
- Une surcharge des services clients des mutuelles, confrontés à une montée des réclamations.
Pour l’Agirc-Arrco, organisme en charge des retraites complémentaires, la pertinence et l’exactitude des informations transmises sont essentielles pour une bonne gestion des droits sociaux. Le logiciel Arpège devait intégrer des passerelles automatisées favorisant ces échanges. Leur interruption implique un retour à des modes de communication plus traditionnels, moins efficients et plus coûteux.
Un tableau synthétique souligne les incidences pour chaque partenaire :
Partenaire | Conséquences de la suspension | Mesures d’adaptation |
---|---|---|
Mutuelles santé | Retards dans versements complémentaires | Renfort des équipes support et communication accrue |
Agirc-Arrco | Interruption des échanges automatiques | Reprise des processus manuels avec contrôle renforcé |
URSSAF | Ralentissement des procédures de cotisations | Coordination accrue avec la CNAM et CPAM |
Cette situation complexe vient rappeler que la réussite d’un projet informatique dans la sphère publique ne repose pas uniquement sur la technologie, mais sur une chaîne collaborative impliquant techniciens, utilisateurs, partenaires sociaux et assurés.
Questions fréquentes sur la suspension du logiciel Arpège et ses conséquences
Pourquoi l’Assurance Maladie a-t-elle suspendu le déploiement d’Arpège ?
La suspension fait suite à des difficultés techniques et organisationnelles constatées durant les phases tests en Loire-Atlantique et en Vendée. Ces problèmes ont conduit à des retards importants dans le versement des indemnités journalières et à une augmentation des réclamations des assurés.
Quels sont les délais moyens de versement des indemnités dans les départements tests par rapport au reste de la France ?
En Vendée, ils sont de 33,6 jours, en Loire-Atlantique de 42,1 jours, contre une moyenne nationale de 30,8 jours. Ces temps prolongés montrent un retard significatif lié à l’utilisation du logiciel Arpège.
Quelles mesures ont été prises pour pallier les retards de paiement ?
L’Assurance Maladie a mis en place des acomptes, renforcé les services téléphoniques des CPAM, augmenté les effectifs et lancé un audit pour comprendre les dysfonctionnements et y remédier.
Comment les assurés peuvent-ils faire valoir leurs droits en cas de retard ou d’absence de versement ?
Ils peuvent contacter leur CPAM via Ameli, se rapprocher de leur médecin traitant, solliciter l’aide d’associations ou syndicats, et, si nécessaire, engager un recours contentieux.
Quelles leçons la CNAM tire-t-elle de cette expérience pour son futur outil ?
La CNAM insiste sur l’importance d’une concertation étroite avec tous les acteurs, l’adaptation aux besoins terrain, une formation adaptée des agents, et la mise en place de dispositifs de secours pour garantir la continuité du service.